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Montagne d’Or : Sophie Charles et Alexis Tiouka s’expriment sur le changement de position d’Emmanuel Macron face au projet

Crédit photo : Collectif Or de Question

Le lundi 06 mai 2019, Emmanuel Macron a annoncé lors d’une conférence à l’Élysée que le projet Montagne d’Or n’était « pas compatible avec une ambition écologique en matière de biodiversité ».

Ce changement de position fait suite à une rencontre avec une délégation de scientifiques de l’IPBES (Plateforme Intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques). Le rapport rendu par ceux-ci annonce une menace d’extinction pour 1million d’espèces animales et végétales sur les quelques 8millions d’espèces évaluées à ce jour sur Terre.

Pour Alexis Tiouka, expert en droit des peuples autochtones et candidat aux élections européennes sur la liste « Écologie Les Verts », ce retournement de situation doit être pris avec de grandes pincettes. « Je pense qu’il ne faut pas se réjouir de son annonce. Il n’a pas dit que le projet était annulé. Selon moi, il repousse juste une décision alors que 70% de la population guyanaise a déjà donné un avis défavorable sur ce projet. Il compte sur le temps. Sa déclaration s’inscrit dans une démarche d’urgence électorale et non dans une démarche d’urgence écologique. Ses paroles ne signifient en aucun cas des actes futurs. Je me réjouirai le jour où il dira que le projet est entièrement abandonné et qu’il est enterré, en accord avec la COP 21 et les accords internationaux qui ont été pris.

À l’heure actuelle, aucune décision n’a été prise. Il a juste fait un constat. Il ne fallait pas un semblant de rapport pour faire cette annonce alors que les experts avertissaient déjà le monde politique sur les dangers de la perte de la biodiversité depuis 1982. On connaissait déjà tous la situation sur la biodiversité depuis des années. »

Dans un communiqué, la maire de Saint-Laurent du Maroni, Sophie Charles déclare quant à elle que « L’annonce du Président de la République va dans le sens de la position que j’ai soutenue depuis ma prise de fonction. Le projet ne doit pas se faire à n’importe quel prix. Le projet Montagne d’Or n’est acceptable que s’il répond aux exigences environnementales et s’il apporte suffisamment de retombées pour le territoire. En attendant que le projet remplisse les conditions demandées par l’État français, il est indispensable d’apporter des solutions dans les meilleurs délais pour répondre à l’urgence des besoins et développer l’Ouest. Je pense à la mise en place de véritables formations pour nos jeunes, à la création d’une route pour contourner Saint-Laurent et permettre le développement d’activités sur cette zone ; à la sécurisation de l’approvisionnement électrique de l’Ouest. Ces actions sont indispensables au développement de l’Ouest ».

Si les défenseurs du projet se targuent de la probable création de plus de 3000 emplois dans un environnement au taux de chômage catastrophiquement élevé, la question est donc désormais de savoir si les profils des jeunes guyanais recherchant activement un emploi correspondent aux profils recherchés par l’entreprise Montagne d’Or. Si l’Ouest guyanais est en capacité de mettre en place d’éventuelles formations afin que ces profils correspondent. Et dès lors que des formations existent, combien de Guyanais seraient réellement prêts à aller travailler au fond d’une mine durant plusieurs jours avant de pouvoir rentrer chez eux.

Madame le Maire rappelle également que si elle est d’accord sur le fait qu’il est bien d’être vigilant sur les risques environnementaux potentiels du projet Montagne d’Or, il faut l’être tout autant sur les ravages environnementaux que provoque l’orpaillage illégal qui menace 300.000hectares de forêt Amazonienne en Guyane et dans l’Ouest en particulier. « La protection de l’environnement, essentielle à mes yeux, ne pourra exister sans développement : le retard dont souffre aujourd’hui le territoire est le terreau de toutes sortes d’activités illégales aux lourdes conséquences sociales et environnementales. La misère et le désespoir sont les pires dangers pour la biodiversité ».

De son côté, l’entreprise Montagne d’Or certifie vouloir faire évoluer le projet afin qu’il réponde aux exigences de l’Etat français. Le défi est de taille car à l’heure actuelle, il n’existe aucun exemple de mines, à l’échelle mondiale, qui a pu être considérée comme « propre » en termes de respect des droits du travail et de l’environnement comme il faudrait les respecter en Guyane si l’entreprise Montagne d’Or applique la législation française et européenne.

Un article écrit par Clémence Mouton